Un brouha incessant emplit la pièce. L'on pourrait croire que par respect pour le cadavre de Jonathan, le silence s'imposerait, mais non, il y a débat. Sa soeur prend la parole:
-Ecoutez moi! ECOUTEZ MOI! Je sais comment jo est mort, ce n'est pas un assassinat, mais un suicide, regardez donc, le pistolet au sol, et la chambre était fermée à clé, comment voudriez-vous qu'il s'agisse d'un assassinat? Elle saccade ces mots sur un ton impérieux, et son indifférence à la mort de son frère ne semble bouleverser personne.
Le brouha reprend de plus belle, chacun à sa version des faits, et les enquêteurs d'un jour émettent de nombreuses hypothèses:
La mère, une superbe sicilienne, pense que si le petit est mort, c'est que Dieu l'a voulu. (Je commence à me demander si cette famille n'est pas détraquée, enfin continuons). Le père dit que Jo faisait parti des faibles, qu'il n'a jamais su se faire entendre, s'imposer en ce monde, et voilà ce qui l'a tué. En sorte que sa version rejoint celle de sa femme, la puissance divine a tranché. Le parrain, le sage de la famille admet que les raisons de sa mort sont ambiguës, mais que ce ne peut être la volonté divine, car logiquement, celle-ci n'utilise pas de revolver. Enfin sa femme, la seule qui semble touchée, dit que ce sont ces foutus mafiosis qui l'ont descendu, parce qu'il était trop bavard.
et le brouha reprend. Mais voilà qu'un papier, rédigé sur un bloc note, attire l'attention; il est écrit:
C'est l'heure de ma mort
Mon coeur je te serre fort
Père c'est toi que j'embrasse d'abord
Qui que vous soyiez
Ma conscience ne peut le cacher
Tué, je ne l'ai été.
Jo
-Voilà qui met les choses au clair, clame le parrain qui ne désire pas en savoir plus. Ce gamin aurait pu être poète, c'est regrettable, pourtant les raisons de son suicide restent floues. Les autres n'ont rien à dire, ils réfléchissent.
-Je crois, Père, que Jo n'a pu survivre à la réalité, voilà 22 ans qu'il vivaient bercé par l'argent de la famille, mais lorsqu'il a comprit que son argent, il devrait le faire seul, et que vous lui avez dit au jour de ses 22 ans:
"Construis ta fortune, et à celle-ci s'ajoutera la notre, seulement comme tout le monde dans la famille, il faudra que tu comprennes que l'argent ne tombent pas des oliviers, maintenant, va, va et ne reviens que lorsque tu seras riche".
Jo est revenu sans le sou, déshonnoré, humilié même, et toi Père, tu lui as dit de rentrer, mais que jamais plus il ne serait ton fils. Voilà la raison de son suicide. Le père, imperturbable, ajoute:
-'Pourtant il dit dans son message, Père c'est toi que j'embrasse d'abord, en l'occurence il ne peut m'en vouloir.'
Soudain, la femme de jo, Irena, crie au Père:
-'Assassin, c'est vous le coupable, vous le meurtrier, vous qui avez appuyé sur la détente.'
-'Ne poussons l'accusation si loin, tuerait-on par des paroles? Irena, je comprends ta furie, mais Jo le savait, il est nécessaire de s'imposer dans la famille, il a mis fin à ses jours, simplement car il ne pouvait vivre sans fierté. Cesse d'incomber Ton beau-père.
Irena sanglote, sèche ses larmes, et repart dans un accés de colère. la mère à l'air de s'ennuyer, elle doit penser au repas du soir.
-'Non, Ce ne sont des métaphores, Beau-père a bien tué mon coeur, lisez vous même! Chacun des premiers mots forment une phrase, 'C'est mon père qui m'a tué'. Jo n'a pas voulu donner son meurtrier trop facilement, car même dans sa mort il aurait perdu son honneur.'
Le père rougit alors, comme démasqué, il tente vainement de se disculper:
' Me croyez-vous capable de... d'un tel acte, comment aurai-je pu... Non vous ne pouvez croire ces sottises! Idiote!' il frappe Irena, sa chevalière ensanglante la joue de la douceur de Jo.
Mais un nouvel événement vient renverser la situation, un nouveau texte de Jo, cette fois-ci en prose, se trouve être glissé dans un livre de beckett. lorsque Le parrain l'ouvre pour voir quels furent les derniers mots que jo lut, le papier glisse. Il lit à haute voix:
Mon premier est la partie du visage qui s'amuse
Mon second est un légume succulent qui éclabousse
Mon troisième regarde de travers pour servir la soupe
Mon quatrième est le poisson que l'on a dans les cheveux
Finalement si vous utilisez mon premier pour ce qu'il y'a de plus beau, mon second pour ce que le tueur fait de mieux, mon troisième pour sa façon d'inspecter, mon quatrième pour sa manière de se coiffer, vous comprendrez que la personne qui m'a tué, n'est autre que la plus innocente.
Tous s'attablent à une réflexion, et la charade est relativement vite résolue:
-La partie du visage qui s'amuse, la joue! scande le père rassuré par se renversement de rôle
-Le légume qui éclabousse, autrement dit qui... Asperge! lance le parrain dont la curiosité semble éveillée
-Regarde de travers pour servir la soupe, ne serait-ce la louche ? dit la mère incertaine, mais intriguée
-Le poisson dans les cheveux, c'est la raie! et bien voilà nos quatres mots réunis... Désespère Irena
La mère tempère violemment: -'Non, ce n'est pas moi, c'est une vulgaire accusation, je sais que je correspond à chacun de ces éléments, que j'ai une raie dans les cheveux, cuisine bien les asperges, que j'ai de belles pomettes, et que je rigole à loucher parfois. Mais je n'ai pas tué mon fils!
Tous sont choqués, ils n'avaient pas pu imaginé une seule seconde un tel dénouement! De plus elle a participé au jeu, et y a contribué, si elle avait été coupable elle n'aurait pas donné de piste.
Mais un autre élément vient parfaire le tableau, une nouvelle piste, écrite dans la main de Jo:
Voilà un clochard, de celui-ci, je suis le frère, pourtant ce clochard n'est pas mon frère, qui est-il? Le clochard m'a tué
Irena intervient: 'Ce clochard est ton demi-frère! elle se rend rapidement compte que dans son élan, elle dit n'importe quoi.
Le parrain clame dit alors: 'Ce clochard est ta soeur, la soeur de Jo l'a tué.'
-'Comment mais c'est absurde, vous voyiez une femme comme moi se servir d'une arme comme celle-là, sans laisser de traces sur ses mains et en agissant aussi parfaitement ?' soupire la soeur, complètement désapointée.
Le père admet lui même qu'il ne croît pas à cette hypothèse, et avoue qu'il préfèrerait reprendre les recherches le lendemain. Tous quittent la pièce, laissant Jo seul.
Le silence envahit la pièce
Jo se relève, rit, sort par la fenêtre, puis une fois qu'il a atteint une certaine distance, il appuit sur le bouton, et la maison explose. Il part en pensant, que le peu d'intérêt qu'avait sa famille pour lui même à l'heure de sa mort, lui donne bien le droit de penser qu'il a réussi à s'imposer dans ce monde.